BLOCKCHAIN TOKEN quels usages dans la propriété intellectuelle au delà de la preuve de création ? C’est la question à laquelle Laurence Joly, organisatrice du colloque Club des Innovateurs de la PI, me demande de répondre.
Pour commencer et (re)border le terrain, voyons d’abord l’intérêt (en 1 slide) de la preuve de création d’une oeuvre par l’usage d’un protocole blockchain.
C’est facile grâce aux fonctions d’authentification et de contrôle d’intégrité inhérentes à tout protocole blockchain.
Pour bien comprendre ce qu’est une blockchain de traçabilité, je vous invite à aller lire mon post de blog sur cet aspect spécifique (et très répandu) de l’usage des protocoles blockchain.
BLOCKCHAIN TOKEN et propriété intellectuelle au delà de la preuve de création : parlons des TOKENS !
Si l’on part du principe qu’un droit de propriété intellectuel est matérialisé (???) dans une blockchain, comment « donner des permissions » d’usage à des lecteurs / auditeurs / etc. ?
Il est tout à fait possible d’utiliser un token pour attribuer ce droit d’usage, cette « licence d’utilisation ».
les TOKENS encadrés en France par la loi PACTE
N’hésitez pas à aller lire la loi PACTE du 22 mai 2019 qui organise (une partie de) la règlementation des « actifs numériques » !
Quel TOKEN ?
Ce qui est compliqué en France, seul pays de l’UE a avoir commencé à réglementer l’usage des blockchain, c’est que c’est déjà assez compliqué. Il ne faut pas se tromper parmi les 4 régimes légaux créés par l’Ordonnance de 2016, l’Ordonnance de 2017 et… la loi PACTE du 22 mai 2019.
BLOCKCHAIN et propriété intellectuelle : les TOKENS « de droits »
Faute de temps, nous n’évoquerons que les TOKENS « jeton de droits ». Commençons par la définition légale :
BLOCKCHAIN TOKEN et propriété intellectuelle : le « transfert » d’un « droit » ?
Si l’auteur d’une oeuvre de l’esprit est indéniablement titulaire d’un droit (son droit d’auteur), on peut supputer qu’il en est le « propriétaire », même s’il ne s’agit pas alors d’une propriété « matérielle » portant sur un meuble ou un immeuble.
Si l’on accepte que l’auteur d’une oeuvre puisse être qualifié de « propriétaire », l’auteur peut soit céder ses droits sur son oeuvre, ça ne pose pas de problème en propriété intellectuelle. Cela s’appelle une « transmission » (ou « cession », ça fait plus chic) et c’est assez bien encadré par l’article L.131-3 CPI.
Mais notre auteur peut aussi vouloir « concéder » un droit d’usage sur son oeuvre. Cela se pratique pas mal, et pas qu’en matière de logiciel… Et ça s’appelle une « licence » d’utilisation…
Alors, pourquoi ne pas utiliser un TOKEN pour « ouvrir des droits numériques sur l’utilisation d’une oeuvre numérique ou numérisée ?
Je ne vois pas ce qui empêcherait légalement une société de gestion collective (ou un auteur) de le faire !
Ce serait alors la circulation de ce TOKEN « jeton de droits d’usage » qui pourrait être enregistrée dans un protocole blockchain.
Si ça marche pour une crypto monnaie, pourquoi ça ne marcherait pas pour un droit d’écouter en ligne de la musique ?
BLOCKCHAIN TOKEN et propriété intellectuelle : les contraintes juridiques
Attention, faire commerce de TOKENS « jetons de droits d’auteur » peuvent passer par un enregistrement préalable et obligatoire auprès de l’Autorité des marchés financiers…
ATTENTION encore, cette disposition légale est assortie de sanctions pénales (article L.572-23 du Code monétaire et financier).
BLOCKCHAIN TOKEN et propriété intellectuelle : les contraintes techniques
Curieusement, le législateur français encadre aujourd’hui les TOKENS mais règlemente à peine (incroyable) les « protocoles blockchain » sous jacents. A l’exception de l’obligation de back up externe périodique et de celle imposant l’adoption d’un « plan de continuité d’activité »…
OUI… je sais… ces deux obligations pour l’instant ne visent que les blockchain de traçabilité de TOKEN permettant la circulation de « minibons » (Ordonnance de 2016).
Mais vu la nouveauté de la règlementation, par prudence, j’invite les rédacteurs/rédactrices de contrat de blockchain à ne pas faire l’impasse sur ces deux éléments, nécessaires à la confiance des utilisateurs…
BLOCKCHAIN et propriété intellectuelle : le problème de la preuve ?
C’est sur ce point en fait que l’usage d’un protocole blockchain pose des difficultés juridiques.
Quelle preuve de la création et du transfert des tokens « jetons de licence d’usage » ?
La loi ne dit pas grand chose…
Il faut donc aller regarder le droit commun de la preuve applicable aux protocoles blockchain…